L’expression est ancrée dans notre langage courant : « la zone », synonyme de lieu marginal, peu fréquentable, voire glauque. Mais saviez-vous que ce terme désigne à l’origine un espace bien précis, une bande de terre qui a entouré Paris pendant près de 75 ans ? Pour comprendre cette histoire, remontons le temps !
Les Enceintes de Paris : Un Passé Fortifié
Au fil des siècles, Paris a été protégée par diverses enceintes successives. La dernière en date, l’enceinte de Thiers, fut érigée dans les années 1840 sous l’impulsion d’Adolphe Thiers, futur président de la République. Cette enceinte, rapidement surnommée « les fortifs » par les Parisiens, était un ensemble complexe comprenant l’enceinte elle-même et un réseau de forts détachés, véritables postes de défense avancés (Fort d’Aubervilliers, Fort de Romainville, Fort de Suresnes…).
@bonjourpantin C’est la zone ici ! Connaissez-vous l’histoire de cette expression ? Notre guide-conferencier nous emmène découvrir l’histoire et la géographie de cet espace tampon entre Paris et sa banlieue. Découvrez tous les épisodes de « Venez, je vous emmène » sur bonjour-pantin.fr
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La « Zone Non Ædificandi » : Un Espace de Relégation
L’armée avait insisté pour qu’une zone non constructible (« zone non ædificandi ») d’au moins 200 mètres de large précède l’enceinte. Ce « glacis » devait empêcher les ennemis de s’abriter en cas d’attaque. Mais cette zone, bien que non constructible, devint rapidement un espace de relégation pour les populations misérables, qu’elles soient nouvellement arrivées à Paris ou chassées du centre-ville par les transformations haussmanniennes. Mendiants, déshérités, chiffonniers et prostituées s’y installèrent dans des baraquements de fortune, donnant naissance à une mauvaise réputation qui perdure encore aujourd’hui.
De l’Inutilité à la Disparition : L’Évolution de la Zone
Paradoxalement, l’armée toléra cette situation, réalisant rapidement que l’enceinte de Thiers était obsolète face aux progrès de l’artillerie moderne. L’impératif de maintenir un glacis vide de toute construction s’amenuisa. Après la Première Guerre mondiale, l’enceinte fut démantelée, laissant place aux boulevards des Maréchaux, aux HBM et, plus tard, au boulevard périphérique.
Aujourd’hui, la « zone » en tant qu’espace physique a disparu, même si quelques vestiges subsistent. En revanche, l’expression a traversé le temps, conservant sa connotation de marginalité. Ironiquement, certaines parties de Paris se retrouvent désormais au-delà du périphérique, comme la rue de la Marseillaise, témoignant de l’évolution complexe de cet espace.
Conclusion
La « zone », un mot chargé d’histoire et de connotations, nous rappelle l’évolution de Paris et de sa périphérie. De fortification militaire à espace de relégation, puis à simple expression, son histoire est riche en enseignements sur l’urbanisme et la société parisienne.