Kataline Patkaï est la fondatrice du café associatif et participatif PAS SI LOIN, situé aux Quatre-Chemins, à Pantin. A cœur ouvert, elle nous parle de son quotidien, de ses combats et épreuves au sein de ce triangle
Elle a le vernis qui s’écaille de ces femmes séduisantes mais ancrées dans le réel. Un pull coquelicot, un jeans moulant, et une bonne dose humour. Elle nous apprend que le nom de son café est à prendre au sens propre comme au figuré, humainement et géographiquement dans cette distance Paris/Banlieue.
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« Vaut mieux pas réfléchir quand on s’installe ici ». Non qu’elle ait des regrets, au contraire, car « c’est ici qu’il faut être ». Elle est la seule salariée dans le café, le reste de l’équipe est composé de bénévoles armés de bonne volonté. « Il y a toujours ce petit miracle qui passe la porte ». L’association commence à prendre, même si pendant longtemps, elle a manqué de ressources pour soutenir le projet. Elle s’oblige à proposer un menu chaque jour renouvelé, composé d’un plat et d’un dessert, au tarif de 10 euros. Le prix n’est pas accessible à tous, elle en convient, mais cela permet des croisements intéressants, des zones de dialogue entre des populations différentes, qui d’ordinaire ne se rencontrent pas. « On dit souvent qu’il faut se ressembler pour se réunir, mais c’est faux ».
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« Je suis arrivée à Pantin il y a 8 ans par contrainte. Je venais du milieu du spectacle. J’ai commencé à habiter un 37m2, insalubre, au 5e étage, avec mon enfant. J’étais un peu perdue, je fréquentais beaucoup les lieux publics en rapport avec les enfants. C’était mon quotidien. J’ai sympathisé avec de nombreux parents, des mamans surtout. Avec lesquelles, on a fait le constat qu’il n’y avait pas de lieu pour nous réunir. Je voulais un lieu confortable pour les femmes dans ce quartier complètement masculin, car les femmes n’ont pas d’existence ici. Avec la mairie de Pantin, j’ai construit ce café, au début donc pour les femmes, mais ouvert aux hommes. »
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Elle nous raconte son épuisement au début de l’aventure car sa position n’était pas tenable : trop « à cœur ouvert », trop franchement, trop sensible, aujourd’hui elle tente surtout de comprendre l’autre. « Alors oui il y a une culture de territoire en banlieue mais s’il y a la confiance, le partage est possible ». Kataline n’a pas peur, elle est curieuse. Et c’est justement cette qualité qui permet d’ouvrir sur des discussions existentielles, fondamentales. « Les gens attendent d’un lieu comme le mien de la considération. Et mon café est identifié comme un lieu qui fait du bien. Alors j’espère que cette flaque va grossir, s’étendre, et qu’on va arriver à tous bien vivre ensemble. J’espère que les petits jeunes qui arrivent aujourd’hui de Paris vont jouer le jeu, et j’ai de l’espoir car les murs se fissurent. »
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En parallèle de son activité de café-restaurant, PAS SI LOIN s’anime très régulièrement autour de projections, de réflexions/échanges, de projets d’exposition, de distribution de légumes et même de séances de yoga. « Et tout le monde dans le quartier nous voit faire du yoga car ce sont des baies vitrées, en soi c’est déjà une révolution. » Quand on lui demande si elle remettra le couvert à la fin de l’année, elle nous répond qu’elle y réfléchit encore. Kataline n’a pas oublié son premier amour, la danse, et elle s’imagine très bien mettre en scène une chorégraphie de son quotidien, une comédie musicale, car tous les acteurs sont déjà là…
Portrait pantinois réalisé par Elisa Palmer
Le Pas si loin
1 rue Berthier
93500 Pantin
Réservation : 09 53 20 37 63
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